Conseil de Paris Centre : discours d'Ariel Weil

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Mise à jour le 11/07/2020

Ariel Weil
Madame la Maire de Paris,
Monsieur le Député de Paris,
Monsieur le Sénateur de Paris,
Messieurs les Maires du 2e, 3e arrondissements,
Mesdames et messieurs les élu.e.s de Paris et de Paris Centre,
Mesdames et messieurs,
Nous vivons en cet instant précis un moment unique dans l’Histoire de la Ville de Paris. En 1859, Paris s’étendait des 12 arrondissements hérités de la Révolution Française aux vingt arrondissements actuels. Le découpage territorial de la municipalité n’avait plus changé jusqu’à aujourd’hui. Mais depuis quelques instants, par la vertu du premier vote de cette assemblée nouvellement constituée, Paris Centre existe. Ce territoire a cessé d’être un simple article de loi pour devenir une réalité administrative, géographique, historique, et surtout humaine.
Mais revenons un instant sur l’Histoire et la Géographie. Ce qu’elles nous disent, c’est que le territoire de Paris Centre forme en réalité une unité cohérente depuis des siècles. Tout en effet unit nos 4 arrondissements. Leur grande frontière nord en forme de courbe, d’ouest en est, de la Seine à la Seine, marque la dernière grande enceinte défensive à délimiter les frontières de la Ville de Paris.
La Maire de Paris le sait bien : chère Anne Hidalgo, toi qui nous fais l’honneur d’être à nos côtés pour cette séance historique, tu as dans ton bureau le fameux plan de 1615 de Mérian qui en réalité fixe les frontières du Paris Centre d’aujourd’hui. À l’époque, ce sont celles de la ville et de la Cité tout entières. La courbe des enceintes, qui correspond aujourd’hui aux grands boulevards, est même bien plus ancienne encore : c’est une frontière naturelle, géologique qui date d’avant le néolithique : celle de l’ancien bras de la Seine. Chaque grande crue en rappelle l’existence.
Je vois vos regards : non, chers élus, nous n’allons pas refaire surgir ce bras de la Seine, qui ferait de Paris Centre une île, et proclamer notre indépendance. Mais oui, nous avons bien le projet de réinventer Paris depuis son centre, comme à chaque époque, dans le respect de son Histoire et de sa Géographie.
Ce territoire est un palimpseste : toutes ses strates s’y dévoilent à chaque coin de rue. Nous l’avons souvent parcouru du sud au nord, avec Anne Hidalgo et Pierre Aidenbaum, en remontant la rue des Archives, de l’Hôtel de Ville à la Mairie du 3e, en suivant le mouvement même des extensions successives de Paris.
Les bâtiments des 4 anciennes mairies d’arrondissement de Paris Centre, construits au 19e siècle, racontent cette histoire plus ancienne qui s’est nouée sous leurs fondations.
  • Les mairies des 4e et 1er arrondissements, sont situées aux abords mêmes de l’enceinte de Philippe Auguste qui délimitait Paris au Moyen Age.
  • La mairie du 2e donne, elle, sur les anciens fossés de l’enceinte de Charles V, construite au 14e siècle.
  • La mairie du 3e, quant à elle, porte sur son parvis le rappel de l’emplacement de la tour des Templiers construite au 13e siècle.
Elle se tient sur un lieu de Paris longtemps entouré des champs et des cultures maraichères que nous comptons bien faire resurgir, chère Audrey Pulvar.
C’est cette Mairie du 3e, choisie par les habitants pour devenir celle de Paris Centre, qui nous accueille aujourd’hui. Je voudrais saluer son Maire, Pierre Aidenbaum qui a présidé cette cérémonie : je te connais comme beaucoup d’entre nous depuis bien avant d’être élu. Mais depuis que je suis Maire du 4e arrondissement il y a à peine plus de 2 ans, tu m’as guidé et nous avons fait Marais Commun bien avant que Paris Centre ne soit une réalité, sous le regard bienveillant d’Anne Hidalgo. Toi qui as grandi dans le 4e arrondissement, été maire du 3e, chef d’entreprise du 2e, tu incarnes presque à toi tout seul Paris Centre.
Tu m’as fait aujourd’hui un double honneur. Double parce qu’en plus du simple privilège de me voir adoubé par l’un des bâtisseurs du Marais moderne, je me suis vu traité comme Anne Hidalgo elle-même, à qui tu as remis l’écharpe de Maire de Paris il y a quelques jours, en tant que doyen du Conseil de Paris.
J’en profite pour te féliciter, chère Anne Hidalgo, au nom du conseil nouvellement constitué de Paris Centre, pour ta réélection comme Maire de Paris. Et te remercier à titre personnel de la confiance que tu m’as accordée, à moi simple habitant engagé du quartier inconnu en politique il y a si peu, élu conseiller du 4e arrondissement en 2014 et aujourd’hui premier maire de Paris Centre. J’en mesure l’honneur. Et la responsabilité.
Avec Pierre Aidenbaum, Jacques Boutault et Jean-François Legaret, qui n’a pas pû être là aujourd’hui : nous sommes aussi les 4 derniers maires des 4 premiers arrondissements de Paris. Et toi, Pierre, tu es depuis quelques jours le premier Adjoint à la Seine de la Maire de Paris.
Par la volonté d’Anne Hidalgo, qui t’a confié cette magnifique délégation à la Seine, c’est donc toi qui es désormais le gardien de notre frontière sud. Avec la création de Paris Centre nous avons maintenant la plus grande emprise sur la Seine de tous les arrondissements de Paris.
Les abords de notre fleuve étaient fréquentés par les Parisiens depuis des siècles,jusqu’à la construction d’une autoroute il y a 50 ans. Tu les leur as rendu, avec courage et détermination, chère Anne Hidalgo. La Seine et ses rives joueront un rôle crucial pour nos projets de végétalisation, de mobilité, d’approvisionnement agricole, entre autres.
Dans ton discours de réception de la Maire de Paris, Pierre, tu as évoqué tes racines d’immigrant, qui faisaient écho à celles de la famille d’Anne Hidalgo, venue d’Espagne. Ta famille à toi a choisi de venir de Pologne dans ce village refuge qu’est le Marais. Cette Histoire nous est commune à tous les deux. Ma mère (que je salue) et toi, vous avez même dans votre enfance habité à quelques mètres l’un de l’autre, rue des Rosiers.
Enfant d’immigrés, ma mère a grandi apatride à une époque où la mixité des identités et des cultures composites semblait peut-être plus évidente qu’aujourd’hui. Elle a fréquenté la même école que toi, celle qui élève aujourd’hui mes enfants (nos enfants, chère Delphine) cette école de la République que l’on venait chercher de toute l’Europe. Je suis l’héritier de cette Histoire.
Mais je suis aussi l’héritier d’une autre histoire. J’ai conscience de vous raconter un peu ma vie mais je voudrais vous confier ceci. Si du côté maternel, j’appartiens à une famille d’immigrants récents, du côté paternel, en revanche, je descends d’une famille parisienne depuis des siècles. Et il y a tout juste un peu plus d’un siècle, ma grand-mère paternelle naissait au 244 rue de Rivoli, dans le premier arrondissement de Paris.
La rencontre entre le prolétariat immigré et la grande bourgeoisie parisienne ne fut pas simple dans ma famille. Il fallut beaucoup d’amour à mes parents pour surmonter l’hostilité issue de préjugés sociaux. Et aujourd’hui, j’aime lire dans les retrouvailles symboliques de mes 2 familles ainsi réunies par la création de Paris Centre, l’image du rassemblement des histoires complexes de toutes les Parisiennes et de tous les Parisiens, et en particulier de toutes les familles de Paris Centre, dans toute leur diversité de conditions sociales ou amoureuses.
Même le Premier Arrondissement, si solidement ancré à droite, et c’est historiquement inédit, a donné la majorité au projet que nous avons porté, avec le collectif Paris en Commun, derrière toi, chère Anne Hidalgo. Une courte majorité, mais la majorité : preuve qu’il n’y a pas de déterminisme sociologique.
Pour autant, du 1er au 4e arrondissement, et c’est heureux pour le débat démocratique, les Parisiens n’ont pas tous voté pour ce projet.
Je veux saluer ici les élus de l’opposition, qui ont porté un autre projet, à commencer par Aurélien Véron et les 3 conseillers qu’il emmène avec lui, tous nouvellement élus, et le député Pacôme Rupin. Avec ma majorité, j’aurai à cœur d’écouter tous les Parisiennes et les Parisiens du Centre, d’entendre les doutes, les difficultés et les angoisses, et de convaincre, de modifier ou même d’ajuster quand il le faudra. Et toujours de dialoguer avec vous, dans le respect républicain que nous avons conservé pendant cette campagne, en évitant la surenchère, l’attaque ad hominem, et les contre-vérités qui font tant de mal à la politique. Je souhaite que nous conservions toujours dans cette assemblée ce respect mutuel qui sert la démocratie. Je suis convaincu par vos discours introductifs, dont je vous remercie, que ce sera le cas.
Malgré ce respect mutuel, la campagne, inédite dans sa longueur, l’a aussi été dans sa dureté. Interrompue par une crise sanitaire mondiale, elle a vu le meilleur et le pire se côtoyer.
Le pire, c’est la maladie. Et la mort. Celle en particulier de plusieurs de nos proches
  • Je veux saluer ici la mémoire d’Alain le Garrec, ancien conseiller de Paris, du 1er arrondissement, grand amoureux des Halles, qui fut notre colistier au 1er tour des Municipales. Et qui nous manque tant.
  • Je veux aussi saluer la mémoire d’un autre habitant historique de Paris Centre, grand élu de la République, sénateur puis député européen, mon cher ami Henri Weber, auteur entre autres de l’éloge du compromis.
  • Je veux, enfin, saluer la mémoire de Pierre Housieaux, cet acteur clé du centre de Paris, à la fois grand président du Paris Historique, membre de la Commission du Vieux Paris, et cadre de l’Agence Régionale de la Santé, mobilisé volontaire du COVID.
Le meilleur de cette crise, ce sont nos soignants qui n’ont pas failli, et qu’il faudra continuer à soutenir après la crise, comme nous soutenons la vocation médicale de l’Hôtel Dieu, notre cher hôpital du centre de Paris. Le meilleur, ce sont aussi les citoyens solidaires et engagés au service des plus démunis pendant la crise, au Carreau du Temple, à la Soupe Saint Eustache ou dans les ateliers de confection de masques de nos mairies. Leurs bâtiments publics continueront tous à accueillir des services publics municipaux. Ces nouveaux espaces libérés constituent même l’un des principaux intérêts de ce regroupement de nos arrondissements.
L’autre peut paraître administratif mais il a trait à la gouvernance même de notre territoire. Avec ce regroupement, l’échelle du territoire déjà pertinent pour nos services administratifs de voirie, de propreté ou de sécurité, par exemple, celle de Paris Centre, devient aussi celle du politique, de cette assemblée. C’est un énorme progrès. Qui demande une nouvelle gouvernance. Madame la Maire de Paris, chère Anne Hidalgo, tu l’as annoncé : tu entends donner plus de pouvoir aux arrondissements. Comment ? D’abord en leur donnant les moyens d’un véritable pilotage territorial des services. Je veux en faire l’annonce ici avec toi : dans les prochains jours nous comptons nommer une directrice générale des services qui sera une véritable cheffe de territoire. Ce sera une petite révolution dans la gouvernance du territoire, permise ici par la réunion de nos arrondissements.
Avec la végétalisation du parc des Rives de Seine reconquises, avec la création de grandes promenades vertes structurantes, avec le rééquilibrage de l’espace public au profit des piétons (y compris en fauteuils roulant ou en poussette) grâce à la piétonnisation de Paris Centre, qui ne servira plus de raccourci, avec l’amélioration de la qualité de notre alimentation… nous avons devant nous des chantiers critiques pour notre avenir et notre santé, celle de nos aînés, celle de nos enfants.
Nous y travaillerons avec l’ensemble de tes adjoints, chère Anne Hidalgo. Mais nous avons la chance d’en compter 3 dans notre seul conseil de Paris Centre, chargées de sujets ô combien critiques pour nous : l’alimentation et les circuits courts, notamment pour nos cantines, chère Audrey Pulvar ; les seniors et les relations entre nos générations chère Véronique Levieux et, donc, la Seine et sa reconquête, cher Pierre Aidenbaum.
Pour déployer ces beaux projets dans le Centre de Paris, les élus de Paris Centre porteront aussi de belles délégations : je dévoilerai dans un instant à cette assemblée la constitution de l’exécutif local, avant que nous votions la liste des adjoints. Je regarde cette belle assemblée, l’expérience de ces femmes et de ces hommes, dont beaucoup sont élus pour la première fois, après des années d’engagement citoyen. Et je suis fier. De votre engagement à mes côtés, de notre engagement pour l’intérêt commun, aux côtés de la Maire de Paris, Anne Hidalgo.
Nous nous tenons dans la grande salle de la mairie, il y a du public, nous sommes samedi. Tout cela ressemble fort à un mariage… En un sens, nous élus et habitants des 1er, 2e, 3e, et 4e arrondissements, nous sommes semblables à ces mariés qui entrent à la Mairie célibataires et repartent unis par les liens du mariage. Nous sommes entrés tout à l’heure dans la Mairie du 3e arrondissement et, par la magie du verbe performatif, nous allons dans quelques instants ressortir de la Mairie de Paris Centre !
Vivent les mariés
Vive Paris Centre
Vive Paris
Merci.
Ariel Weil